Challenge Hebdo : les prix ne cessent d'augmenter, notamment alimentaires, entraînant la hausse du niveau de vie. Pourquoi à votre avis, Fès enregistre-t-elle la progression la plus importante depuis le début de l'année ?
Ahmed Lahlimi : ce décalage de l'ICV à Fès par rapport au niveau national, on le relève non seulement au cours du mois de février 2008 mais également tout au long des deux dernières années. En 2006 et 2007, les hausses étaient de 3,9% et 3% respectivement à Fès, contre 3,3% et 2% au niveau national. Maintenant pour le mois de février dernier, l'augmentation de l'ICV, par rapport à janvier de la même année, était à Fès le double de celle enregistrée au niveau national. Cela est dû en particulier à une baisse des prix des fruits et légumes frais à Fès moindre qu'au niveau national, soit deux à cinq fois moins. Quelle explication à cela ? Il faut la chercher dans les conditions spécifiques de l'offre et de la demande dans la région.
C. H. : comparativement aux constats de la fin d'année 2007, il ressort de votre analyse que Tanger et Tétouan sont les villes les plus chères du Maroc. Comment peut-on expliquer qu'en l'espace de deux mois seulement, le classement soit ainsi chamboulé ?
A. L. : les prix à Tanger et Tétouan restent toujours les plus chers, seulement c'est le niveau de variation de l'indice qui a été plus fort à Fès que dans ces deux villes. Si les hausses des niveaux des prix dans les villes que vous citez ont été plus faibles qu'à Fès, le niveau des prix est de 182,9 à Fès, alors qu'il est de 190,8 à Tanger et de 187,8 à Tétouan, contre 180,2 au niveau national. Les études régionales en cours de finalisation par le HCP pourraient éclairer les raisons de cette situation.
C. H. : l'indice des prix des équipements ménagers et du transport sont par contre à la baisse. A quoi cela est-il dû ?
A. L. : l'indice du groupe «Equipements ménagers» n'a pas enregistré de baisse, mais plutôt une hausse de 2,3% au cours des deux premiers mois de 2008 par rapport à la même période de 2007 et de 0,1% entre janvier et février 2008. La baisse du groupe «Transport et communications» de 3,4% est due, en fait, à la forte baisse (14,8%) de l'indice du poste «Communications téléphoniques», en raison de la concurrence qui prévaut dans ce secteur.
C. H. : votre dernière note sur l'ICV fait remarquer aussi une augmentation de près de 14% du blé tendre. Ce produit est pourtant subventionné. Comment expliquer cette augmentation ?
A. L. : l'augmentation de 13,8% concerne le blé tendre en grains vendu sur les marchés céréaliers et non la farine nationale de blé tendre dont le prix est subventionné.
C. H. : vous menez une étude sur la révision du calcul de l'ICV. Où en être-vous ? Quelles répercussions cela peut-il avoir sur le coût de la vie de manière générale et sur les villes de manière plus particulière ?
A. L. : la réforme en cours permettra d'actualiser le panier de référence de l'indice du coût de la vie et d'élargir sa couverture territoriale à toutes les régions du Royaume (17 villes au lieu de 11 actuellement).
Ce panier de référence de l'indice, défini à partir de l'enquête sur la consommation et les dépenses des ménages de 2001, sera appelé à être actualisé grâce à l'enquête sur les niveaux de vie des ménages réalisée par le HCP en 2007 et qui est en cours d'exploitation. Le nouvel indice devrait permettre d'améliorer la précision de l'indice actuel en prenant en considération les changements, survenus durant la dernière décennie, dans les habitudes de consommation des ménages marocains ainsi que les différentes catégories sociales et leur modèle de consommation.